Introduction
Traduit
littéralement « Déjeuner en haut d’un gratte-ciel » cette
photographie a fêté ses 80 ans en 2016. Elle montre onze ouvriers assis sur une
poutre suspendue au 69e étage du Rockfeller Center en construction, et ce sans
aucune sécurité. Ils sont montrés vêtus de leur bleu de travail avec leur
déjeuner. En arrière-plan on peut voir
Manhattan avec dans le fond à droite le très célèbre Central Park. Pour
l’instant seulement quatre des ouvriers ont été identifiés : Sonny Glynn
et Matty O’Shaughnessy, deux irlandais qui étaient les deux
ouvriers assis à chaque extrémité de la poutre, ainsi que Joseph Eckner, le
troisième en partant de la gauche, et Joe Curtis, le troisième en partant de la
droite. Ces hommes étaient tous de véritables ouvriers du chantier. L’objectif est de
revenir sur l’histoire et le destin de cette image.
Contextualisation
Le 24
octobre 1929 a lieu le krach boursier de Wall Street aux Etats-Unis, appelé le
« jeudi noir ». Cela se produit à la suite d’une peur de la part des
courtiers et des possesseurs d’actions qui souhaitent récupérer l’argent qu’ils ont prêtés.
Les banques ne pouvant rembourser dans l’immédiat vendent leurs actions afin
d’effectuer les paiements ce qui fait baisser les cours, en une journée 13
millions d’actions sont vendues. Les
réactions en chaine liées plongent le monde entier dans la plus grave crise
économique du XXe siècle, appelée la Grande Dépression, marquée par une
augmentation massive du chômage et de la misère. En effet fin de l’année 1932
un total de 40 millions de chômeurs sont recensés dans le monde de l’industrie.
À la
même époque le développement des Etats-Unis se fait de manière très rapide et
des milliers de migrants quittent leur pays natal afin de vivre le rêve
américain et dans l’espoir de trouver du travail. La main d’œuvre ouvrière
était alors très recherchée pour construire les nombreux buildings qui se développaient
dans les plus grandes villes. Il s’agit de très grands immeubles faisant
plusieurs dizaines d’étages et dont les premiers ont été construits à New York
et Chicago car il n’y avait plus de terrains disponibles.
Négatif de la photographie |
Cette
photographie a été attribuée pendant longtemps à Charles Clyde Ebbets car une
commande de photographie du Rockefeller Center lui avait été passée. Puis elle
a été attribuée à Lewis Hyne qui avait photographié les immigrés d’Ellis
Island. Cependant aucune des hypothèses n’a été retenue et l’auteur reste
aujourd’hui considéré comme inconnu. De plus lors de la réalisation de la
photographie, le commanditaire John Davison Rockefeller avait convoqué
plusieurs photographes de différentes agences afin de promouvoir sa « city
within a city », ville dans la ville. Au sein de ce groupe de photographes
étaient présents Charles Clyde Ebbets, dont nous parlions plus tôt, ainsi que
Thomas Kelley et William Leftwich mais aucun ne l’a revendiqué. Les droits de
la photographie sont détenus à l’heure actuelle par l’agence Corbis.
La famille Rockefeller est connue pour avoir fait fortune
dans l’industrie du pétrole lié au succès de l’automobile. John Davidson
Rockefeller a été considéré comme l’un des hommes les plus riches à l’époque.
Il décida fin des années 1920 la construction du Rockefeller Center,
entièrement à ses frais. Il s’agissait d’un gigantesque complexe commercial
associant bureaux, commerces et équipements de loisirs composé de 19 bâtiments
dont une tour de 70 étages appelée le RCA Building. C’est lors de la
construction de cette tour de 259 mètres qu’a été prise la photographie dont
l’objectif était de faire vendre des espaces de bureaux, elle servait ainsi à
la campagne publicitaire de l’immeuble. La construction de ce
bâtiment avait nécessité l’emploi d’environs 4000 ouvriers payé 1,50 dollars de
l’heure. Une seconde photographie, découverte par les frères Seán et Eamonn Ó
Cualáin qui ont enquêté pendant quatre ans sur l’œuvre, montrant les ouvriers
en train de saluer le photographe avec leur casquette prouve cette hypothèse de
mise en scène.
Cette enquête sur les ouvriers de la photographie a permis la production d’un film intituléé « Men at Lunch » paru en 2012 retraçant ladite enquête. Il existe également une troisième photographie montrant les ouvriers nommée Resting on a Girder, « repos sur une poutre » qui représente les mêmes ouvriers en train de faire une sieste sur une poutre.
Cette enquête sur les ouvriers de la photographie a permis la production d’un film intituléé « Men at Lunch » paru en 2012 retraçant ladite enquête. Il existe également une troisième photographie montrant les ouvriers nommée Resting on a Girder, « repos sur une poutre » qui représente les mêmes ouvriers en train de faire une sieste sur une poutre.
Diffusion
Cette photographie est apparue pour la première fois
dans le New York Herald Tribune le 2 octobre 1932. Elle a été imprimée,
reproduite et dupliqué en un très grand nombre d’exemplaires sur des cartes
postales, des posters, des mugs ou des porte-clés fabriqués et vendus partout
dans le monde et est la plus demandée de l'agence Corbis, dépassant celle
d’Einstein tirant la langue. Cette image est
devenue un symbole des états unis, représentative de l’expansion verticale de
la ville de Manhattan visible en contrebas. Elle montre une Amérique positive
et travailleuse à l’heure de la Grande Dépression. Comme l’explique Ken
Johnston au Huffington Post, si on voyait des hommes en lignes c’était pour
mendier à manger. Elle est un témoin du
rêve américain que de nombreux immigrants ont choisi de suivre mais aussi de
l’American Way of Life
La
scène est parodiée à deux reprises dans la célèbre émission Les Simpsons dans les gags du
canapé cloturant lle générique de début, dans l'épisode Pour l'amour de Lisa et
Le Chien-chien à son Homer. Elle sera également reprise par les Muppets.
Elle
sera également reprise dans le dessin animé Moi, moche et méchant 2 dans lequel
les minions mangent disposés de la même façon. Ils sont eux aussi des ouvriers
employés par Gru, le personnage principal, et déjeunent également en bleu de
travail.
La
série Friends n’échappe pas à l’interprétation puisque l’image a été reprise
dans l’un de leur poster sur lequel ils sont présentés en train de lire le
journal dans la même atmosphère de détente. Certes moins nombreux et avec un
angle de vue diffèrent l’idée est toujours la même, ils sont représentés en
hauteur avec la ville en arrière-plan. On peut toutefois noter un petit rappel
du déjeuner avec les trois boites à repas.
Le monde de l’audiovisuel n’est pas le seul à rendre hommage à cette photographie. En effet l’artiste Sergio Furnari a reproduit grandeur nature les onze personnages de cette photographie. Elle a été achevée en 2001 et est déplacée continuellement rappelant le chemin des immigrants. Les statues sont placées en hauteur pour nous surplomber. Le point de vue est bien évidemment différent puisque le spectateur est au sol.
L'artiste Mike Stimpson a lui aussi repris la photographie avec le célèbre jeu de construction LEGO. Les personnages sont eux aussi en tenues d'ouvriers.
Conclusion
Cette photographie conserve encore aujourd’hui bien
des mystères tel que l’identité des ouvriers, ou encore celle du photographe.
Ce n’est cependant pas ce qui l’a empêché de devenir un symbole de l’Amérique.
Ses nombreuses reprises dans le monde de l’audiovisuel et dans l’art sont un
exemple de son incroyable migration.
Sitographie :
- https://www.nytimes.com/2012/11/11/movies/lunch-atop-a-skyscraper-uncovered.html?_r=0 consulté le 12/05/18
- http://www.slate.fr/culture/77946/photo-celebre-rockefeller-mystere consulté le 10/05/18
- https://www.nouvelobs.com/photo/20170822.OBS3639/perches-au-dessus-de-manhattan-une-photo-mythique-et-un-siecle-de-fantasmes.html consulté le 10/05/18
- http://www.larousse.fr/encyclopedie/divers/la_crise_de_1929/187370 consulté le 10/05/18
- http://kartavoir.blogspot.fr/2015/01/n119-lunch-atop-skyscraper-1932-charles.html consulté le 12/05/18
- http://cheese.konbini.com/photos/dejeuner-gratte-ciel-celebre-photo-expliquee/ consulté le 10/05/18
- http://bourgoinmarion.wixsite.com/marionbrgn/parcours-dimage consulté le 12/05/18